So Long Marianne !


Pour plein de choses partout étalées sur les murs, de petites joues creusées et croisées, accrochées les unes aux autres, dans les couloirs hallucinés du métro, je me reprends les pieds dans le tapis. Je rentre là où se frôlent le long des berges les traques d'humaines apparences, et je me retrouve à mon tour baigné dans ta douce atmosphère-amosphère de planète gauloise viciée.

Bout filtre.

Et arrière goût cuivré collé à l'arrière-pays du fond de ma gorge. Je t'aime et je te hais. Pour pays qui s'ouvre et pour pays qui se referme, pour retremper mes lèvres dans la saveur charnue du fruit gorgé d'un plaisir qui s'accentue. Vision de la ville défenestrée qui répète inlassablement son numéro de passe-passe sur le bord d'un banc desséché. 

Le soir sur des paliers où s'étagent les restes caverneux d'une quille percée, la mélasse des jours qui pointent à la ligne retombe et se déverse.

Abondamment.

Mais que se noient ses pulsations, si plus poussées vers l'arythmie cardiaque que le battement harmonieux à l'unisson des nourissons. Français.... Nous voilà redevenus français. A admettre et à souligner du rouge-crayon qui colore l'aller-retour dans les étages du monde. Je vous aime et je vous hais. Je respire mal la vue de votre œil morne, ou des deux, le poil livide et falpi des après-midi de lavasse coagulée, entonnés, marseillais, marseillaises, les testicules en bandoulière qui pendent élastiques et suspects. Fond de soute d'un cargo étiqueté banlieue. Quelques bandes rayées.  Un, deux chiffres. Logo insipide. sans doute payé cher somewhere... Et l'œil vitreux là posé, en face,  barré de noir, ou de beurre rance, derrière lequel gravite une énorme masse filandreuse. Là où tout bouillonne, la fusion des projets bravés, contrés,  décharnés, qui se sont enlisés de vagues en lames et qui me tripatouillent l'espace aérien. Le vent du globe est glacé, ce soir, et accuse les échos oubliés de lointains coups de glas. Les vitrines gloriolistiques où sont allés se noyer nos exploits délégués et quelques barreurs de carte blanche avec. Et vouloir être inutile dans le vide ambiant dévitalisé.

Mais nous, pauvres Marsupilamis, qu'est ce qu'on a fait pour mériter tout cela ?

Est-ce que c'est là et seulement là pour rester ? La gaze collée à la plaie. Le sac sous la nacelle... Et les reflets qui ne luisent pas. Le reste... L'huile et le gazole mêlés qui se répandent. 

Et on te vidange, boy, on te vidange de chacune de tes petites cellules  intramusculaires. De chacune des pulsations qui battent au fond de toi. Touche et tu sentiras où que tu ailles en toi. Elle est là, cette énergie. Elle continue malgré toi et elle t'attend. Elle croise les doigts en espérant que tu saches le comprendre. Que tu verras les tics et les tacs qui se cassent le cœur et le pur esprit à vouloir tourner le long des cadrans. Et tu verras les étincelles qui brillent dans chacun des diamants qui s'égrainent. N'aies pas peur. Comprendre qu'ils soient si précieux ne réclame pas que l'on s'affole à les voir partir au bras d'une fille. Mais il faut savoir les voir venir, avec la force et la détermination qui les laisse s'échapper pour que toi...

Deus ex Machina.

Et on voudrait que se poussent un peu plus sur le côté, les potentiels stridents de ta vie. Les ordres et les contrordres importent peu... C'est à, dans la ligne de fuite des perspectives aplaties que se lie ton destin. Il n'y a pas d'irritation du cuir chevelu, pas de main tendue ou d'ablation à redouter. On s'en fout ! Tu es là, reviens...
La poisse s'accumule facilement au hublot. Magnétique et charnelle. Et je ne vais pas patauger dix ans dans la fange à étaler. C'est là que se lie le changement si tu l'aperçois d'ici... Ouvres grand tes oreilles, parce que le futur étalonné auquel on te destine existe. Il existe différemment  de ce que la connerie exemptée, la saloperie calées en haut bien chaud, au dessus du cervelet,  peut donner de reniflements de fric, de passe-droit, de blanchissement par personnes interposées et de placards racoleurs pour y coller des mouches hallucinées. Il est grand temps de se foutre de leur absence de consistance. Rare qu'il te donnent tes chances. Des chances désincarnées, multipliées au million de tickets-bingo  qui change tout et que personne ne pourra habiter.

Pour lesquels 100% des perdants auront tenté leur chance.

Pas même leur vent qui n'ait quelque chose de substantiel, en vrai et pas en fric, quelque chose d'intelligent, de neuf ou de sensible. Pas de projet. Un monde sans idée, où les tiennes s'enlisent mais ne doivent pas accepter de se taire. Ils viennent bardés des instruments du culte. Mais malgré l'arsenal, la ferveur se casse la gueule dans l'escalier de service. Pas sures ces combines... L'époque est insupportable de conformisme, conventionnelle à mort, jusque dans ses parodies publiques de justice privée et les courants qu'elle balance sur le trône du goût en cours dans un soucis urticant de fric. L'exiguïté mal dissimulée d'un espace intérieur incapable d'avancer autre chose.
Et par manque de projet, de temps, de direction, de fonds, d'enthousiasme, les palissades se prennent des airs d'institution. Vivre en France et ne vivre qu'en France nous cache la réalité tangible d'un monde qui, lui, continue d'évoluer. On arrêtera pas les autres, même en freinant des quatre fers. Et ils voudraient garder les anciens schémas en place. Les vieilles structures nauséabondes héritées, en cadeau mal partagé, du dix-neuvième siècle, du vingtième, et du début de l'actuel — pour combien de temps ? — tenant du titre. Les fossiles mentaux et les tics intellectuels levez la main !

Why ? La peur, boy, la peur viscérale qui leur colle au ventre, de se voir dépassés, rattrapés ou que cela ne se sache si c'est déjà fait. Mais quel mal, après tout ? Est-ce qu'ils sont censés continuer à fonctionner comme des débiles de stressés professionnels. Il est temps d'entériner ces différences là, ensuite les apports de la nouvelle génération instruiront l'ancienne. Nous sommes complémentaires et nous avons besoin les uns des autres. Les gens deviennent meilleurs si tu les traite comme s'ils étaient meilleurs. A partir d'un certain stade, des messages de délivrance apparaissent et s'ébauche quelque chose de nouveau. Une souche prête à la repousse.

La peur est ce qui fait le besoin d'être sécurisé, rassuré dans ses attitudes piteuses, misérables de replis égoïstes, que ça se passe et je sortirai alors, grand seigneur, de ma coquille.  Pas le temps ! Boy, c'est maintenant. Commence à te fabriquer ta vie maintenant. Comme tu peux. Comme tu veux. Il faut du temps et savoir vivre dispense presque de continuer à apprendre. C'est pour ceux qui n'ont plus envie d'apprendre. Juste garder les choses en l'état. Rassure toi, ceux qui te disent qu'ils connaissent la vie sont peut être des menteurs qui ont fini par croire leurs propres mensonges.

Il y a aussi cette petite dose d'angoisse qui gravite dans leur monde. Ca y est ! Le monde est terminé, son apprentissage s'achève et ne changera plus until the end of the world. Mais c'est justement là qu'ils se mettent à ralentir. Et s'arrêter quand les autres continuent, c'est reculer...

Ils ne voient pas que certains ailleurs sont en train de préparer ce zeste restant de futur à presser. Que le japon développe les technologies qui feront de lui le lieu avec la Chine, de la nouveauté qui se donne les moyens de continuer à rêver son futur. Que troisième millénaire ou vingt et unième siècle s'intitule, peu importe. Ceux là ont les envies, et surtout ne touchent pas du doigt le sentiment permanent de l'impossibilité de réaliser les choses en mode nouveau pour du qui soit tangible. Ils ne se réveillent pas en pleurant à chaudes larmes, en pissant sur l'univers de tout l'intérieur de leur vessie gonflée que tout a déjà été inventé et qu'il ne leur reste plus rien à faire sur cette pauvre terre. Où la boulangerie ferme le dimanche en plus ! Que la crise est là et que le partage s'est fait à leur détriment. Ah ! Tiens... Ben, C'est arrivé... Mais la méthode de séparation des richesses, elle est de toute façon immorale, on le sait : pas la peine de gloser dix mille ans. Alors qu'il faut construire ailleurs et différent. Ce n'est pas de simplement reformater une petite attitude qui changera la nature des choses.

La société souffre parce que la société est morte et continue à vivre sur l'illusion des images qu'elle entretient de son passé.

Et ils ne s'embarrassent pas de tous ceux qui s'escriment à vouloir montrer le nord pour suivre les entiers asséchés sans savoir où s'arrêtent leurs intuitions. Pas d'insouciance qui ne soit permise. On ne rêve pas au milieu d'une autoroute.

Si tu n'es pas sur tes gardes, tu te fais échantillonner toi même et ils rejoueront de toi et de tes cordes vocales ultérieurement. La fuite est : en avant, en tout cas. Et ce n'est pas un problème : c'est le seul chemin qui mène quelque part.

Et toi tu es entier, même si ce n'est qu'à moitié d'un des mètres étalons qu'on te brandit au nez. Oublies les mètres étalons. Ce sont des dimensions plates qui ne se prolongent que dans la direction unique qu'on leur a assigné de suivre. C'est toi, devant, dedans, sur le côté, rond et anguleux, plein de ce qui fait ton poids. N'aies pas non plus peur d'ouvrir des espaces qui te rendent à ta profondeur oubliée. Elle est viable et elle balaie, la légère inconsistance des plumes allégées, dévitalisées,  des pauvres en calories. Les passages intermittents d'averses en fin de soirée ne te concernent pas.

Oublies le marasme en bleu et les bulles qui remontent, vides, à la surface. Lâche les  packs dispersés, renfrognés, les sachets plastiques blafards au fond du fond, où tu bois, où tu crisses. Ou te broies les riches heures du grand siècle en équilibre sur son bord de civilisation. De sa porte qui grince aux jointures.

Rongée de l'intérieur.

L'articulation  entre les deux mondes résiste le long de gonds rouillés. Ils se passent le sel, la brosse, ou les couteaux, et se perdent en conjectures elles même indexées sur les cours de la bourse. Et tout le monde qui s'en désintéresse tout en prétendant le contraire. Les rues sales parfois de trop de crachats béants. Accumulés à Paris, où se croisent les fils d'une génération frustrée et des gens que l'on est en train de méchamment blouser. Ils arpentent petitement le sol froid des cadrans de leurs montres. En arcs de cercles, suivre les ronds de jambes et les ronds de cuirs croisés qui s'épanouissent moyennement dans les bon an mal an, les formulaires trombonés que les litiges incohérents achèvent de rendre surréalistes.

Symptômes...

Voyez les meurtrissures. Les stigmates remplissent tout doucement les tours de verre. Une vaste démonstration de connerie lacunaire affichée à tous les étages, en ampoules à bâillonettes. L'indécision qui se téléguide de loin, en fonction de règles protocolaires de la contagion générale du renoncement, de la flétrissure  du besoin, du désir, de l'envie de faire les choses, et de les dire et de les croire pour ne pas se faire vider de ce que l'on est encore. Un soi même qui n'a rien à voir avec les petits egos hypertrophiés des dix années qui viennent de s'évaporer.  Le credo de toc qui a vendu la terre à l'euphorie débile du casino. Le banquier est absent.

Normal, il joue en bourse.

Parce que tanguer n'est pas une règle d'humaine nature sur la terre des ferrailleurs. Parce que coupler les petites poires emmaillotées et régler les gros ballons de rouge qui inoculent la mort à huit ans. Cinq ou six roses et la perte d'une identité dégradée. Elle se sera distraite d'elle même, jusqu'à la plus sinistre des dépossessions. Jusqu'à l'absurde terminal, le mythe épuisé, l'anarchie morale des sentiments qui se font la malle, docteur, en grosse hémorragie dans un écœurement muet. Tandis que la bouillie crasse que déverse obstinément la lucarne du grenier à blé se diffuse jusque loin dans la chambre.

Exit. Tu peux reprendre le cours de tes lectures. Tu peux foutre en l'air tous ceux qui t'aiment. Tu peux déchirer les draps et découvrir soudain le vert rembourré des murs de la chambre qu'on vient de t'offrir. Il y a dans tes veines plus d'énergie que dans toutes les statues de la terre, de la mer et du ciel...



(La suite sera prochainement disponible en librairie.)